Résumé: Avant de s’échouer sur une île étrange, Alouette a fait un long voyage en mer enfermée dans un cercueil en bois. Seule, désorientée, elle ne se souvient de rien à part de Pilou, son petit frère qui n’est pas à ses côtés. Bien décidée à le retrouver, elle va d’abord devoir survivre ! Car cette terre est hostile et peuplées d’animaux inquiétants. Livrée à elle-même, sans repères, Alouette est miraculeusement recueillie par les deux seuls habitants de l'ile : un ancien capitaine de la navale un peu farfelu et une femme austère qui cache un lourd secret. Cela fait bien longtemps qu’ils ont renoncé à l’idée de quitter cette île, trop dangereux. Pourtant Alouette garde espoir, elle sait que son frère a besoin d’elle… À mesure qu’elle s’acclimate, des bribes de souvenirs vont refaire surface, ces flashs lui révèlent un passé trouble où la misère et le froid vous transpercent les os. Mais qui est vraiment Alouette et d’où vient-elle ? Bientôt la jeune fille va redoubler d’efforts pour construire un radeau. Elle n’a qu’un but, quitter cette maudite île où hallucinations, rêves et créatures hybrides se confondent. Mais rattrapée par ses souvenirs, elle devra faire face à ses démons et accepter son passé si elle veut avancer…
Récit aux allures survivalistes aux confins de la folie et du difficile chemin vers l’acceptation, Alouette nous surprend par sa fluidité narrative et la richesse de ses différents niveaux de lecture. Une œuvre sensible et subtile pour un jeune dessinateur prometteur qui signe là son premier album solo.
A
u milieu d'une forêt à l'atmosphère lugubre, une caisse en bois flotte sur l'eau. Alouette soulève le couvercle et se demande ce qu'elle fait là. Ce dont elle se souvient, c'est de son petit frère Pilou qu’elle protégeait des nombreux dangers de la ville où ils vivaient de rapines. Elle accoste sur un îlot et espère qu’il a pu, lui aussi, y parvenir. Seule, elle explore et tente de survivre. Un jour, elle finit par rencontrer Orville et Whisky, deux naufragés qui cohabitent là depuis longtemps. Progressivement, une complicité s’installe, des liens se créent. Cependant, Alouette demeure convaincue que Pilou est toujours quelque part. Si seulement elle pouvait réussir à se rappeler de tout ce qui s’est passé avant…
Dans une ambiance sombre et oppressante, Alouette plonge au cœur de la tourmente une jeune fille déterminée à s'en sortir et à retrouver le seul membre de sa famille encore en vie. Si elle s'allie à un duo de confiance, elle devra néanmoins faire face à d'effrayantes créatures comme tout droit sorties des enfers. L'héroïne cherche à quitter cette île à tout prix. Pour sa première bd en tant qu’auteur complet, Andréa Delcorte explique qu'il «situe l’histoire vers le 16e siècle, après le moyen-âge, entre la Renaissance et l’époque moderne». Il cite également comme influences Bruegel, Miyazaki et Georges Beuville. Dans ce récit s’entremêlent survie, mémoire traumatique et quête identitaire. L’architecture narrative est la principale force d’Alouette ; elle se déploie sur deux axes temporels distincts : l’arrivée de l'adolescente sur une zone hostile d'un coté et de l’autre, les bribes fragmentées de son passé violent où elle résistait à la pauvreté et la faim avec son frère, son dernier ancrage. Cette alternance spatiotemporelle renforce l’aspect onirique de l'intrigue et génère du mystère et de la tension, les informations n'étant distillées qu’au compte-goutte.
Loin d'être esthétique, le trait lâché et tremblotant oscille entre réalisme brut et visions hallucinées ; l'artiste captive par ce style graphique hypnotique.
Derrière cette fable aux accents horrifiques et survivalistes se cache un aspect humain qui explore la résilience et la lutte contre ses propres démons.