Info édition : Noté "Première édition". Dos toilé. En fin d'album, bonus "Pour aller plus loin" de 8 pages.
Résumé: 1600 avant J.-C. L'île de Théra, aujourd'hui connue sous le nom de Santorin, abrite une glorieuse civilisation minoenne guidée par une société matriarcale. Dans ce récit, d'anciennes vérités et mythes perdus tels Minos, Arianne et les mystères du labyrinthe du Minotaure résonnent avec notre époque dans une histoire qui explore la résilience humaine face à la majesté de la nature.
M
er Égée, deuxième millénaire avant J.-C. Barsabas accoste à Théra (Santorin) après une longue absence. Ses anciens amis le reconnaissent immédiatement, ses ennemis aussi. Ida, son ancienne amante est devenue une des dirigeantes de l’île, mais les temps changent. Le régime matriarcal minoen en place depuis toujours est menacé par les Athéniens pour qui le pouvoir est un attribut réservé aux hommes. La lutte qui sévit entre les tenants de la tradition et ceux encourageant le changement s’avère terrible et sans pitié. Cependant, ce que tout le monde ne sait pas, c’est que les Dieux en ont décidé autrement et que le magma monte lentement et inexorablement à travers les entrailles de la terre…
La mythologie est à la mode. Revisiter et moderniser ces contes fondateurs, les mettre en perspectives et, dans le cas présent, les actualiser grâce aux dernières trouvailles archéologiques, Civilisations est un projet ambitieux qui se déploiera sur trois albums indépendants reliés par un mystérieux fil rouge. Avant l’Égypte et Rome, c’est en Grèce antique que Simona Mogavino entraîne le lecteur. La scénariste a pioché au sein de récits héroïques bien connus et les a intégrés dans une narration épique et, cela va sans dire, tragique. Le Minotaure, Dédale, Pasiphaé, Minos et quelques autres revivent à l’intérieur d’un cadre culturel ré-imaginé et le plus réaliste possible. D’un côté les légendes, de l’autre une recréation qui se veut historiquement plausible, avec, au milieu, un thriller politique sanglant, rempli d’émotion pure et de sentiments exacerbés.
Péplum, vous avez dit péplum ? Oui, d’un certain côté. Par contre, un peu comme Murena de Jean Dufaux et du regretté Philippe Delaby, l'aspect carton pâte habituellement associé à ce genre un peu désuet est heureusement totalement absent de Civilisations. La mise en scène et la dramaturgie, très énergiques, sont bel et bien d’aujourd’hui. Carlos Gomez offre des planches à grand spectacle, remplies de détails et grouillantes de vie. Le résultat d’ensemble est véritablement impressionnant. Ressenti maximum, décors et costumes magnifiquement dépeints, le dessinateur et les coloristes (Lorenzo Pieri et Luca Saponti) font réellement revivre ces îles mythiques.
Évidemment, rien n’est gratuit dans ce bas monde et un minimum d’effort et de temps sont nécessaires pour profiter pleinement des qualités de cet album plus grand que nature. Distribution pléthorique, situations, intrigues et psychologies entremêlées, les cent vingt pages sont denses, parfois un peu trop. Un conseil, n’oubliez pas de faire quelques pauses entre deux séquences.
Sérieux, extraordinairement écrit et illustré, Civilisations Crète démontre une fois de plus la force évocatrice des mythes originaux. Intelligemment remise au goût du jour et dotée d’une reconstitution visuelle de très haute tenue, cette nouvelle série historique pourrait déjà être un classique qui s’ignore. Vivement le deuxième tome !
Les avis
Pulp_Sirius
Le 17/09/2025 à 22:32:36
Simona Mogavino avait écrit le très mauvais Thellus, mais l'excellent dessin de Gomez m'a convaincu de donner une chance à cette histoire qui avait un bon potentiel.
Malheureusement, en postface, Mogavino mentionne qu'elle a adapté son histoire pour un « public moderne ». Ahhh, le mythe du public moderne, qui souhaiterait se faire faire la morale au nom d'une bien-pensance universelle. Eh non!
On est censés être en 1600 avant J.-C., mais on dirait un pamphlet féministe du 21e siècle. Ça n'a aucun sens. Voici le genre de belles phrases que l'on retrouve...
- Aux sauvages et indomptables manifestations de fougue des hommes, je m'oppose avec bienveillance...
- Tu nous as prouvé que tu étais esclave des biens matériels. Tant que l'homme agira ainsi, la femme régnera.
- Quelle clémence! Nous ne pouvons pas être en de meilleures mains que celles des femmes!
- Tu sais bien que pour Ida, pour nous tous, ton amour exclusif, jaloux, est contre nature.
- Ils voulurent dominer la nature, et bien sûr, la femme... Mais la tolérance était si profondément ancrée en elle, comme en nous tous d'ailleurs, qu'elle fit tout pour les accepter.
- Tu imagines vraiment notre terre, notre peuple, vivre soumis à ce principe masculin viril et patriarcal?
C'est un peu beaucoup ridicule! Le scénario aurait pu être bon, mais Mogavino décide de faire de son histoire une guerre des sexes qui s'intègre plutôt mal au reste du récit, à vrai dire. Et, enfin, cette fuite d'un peuple d'une île vouée à disparaître ne m'a pas vraiment convaincue. Les dialogues sont bien sûr souvent hyperboliques, les personnages extrêmes. Certains parviennent à être moindrement intéressants, mais les intrigues politiques finalement ne mènent pas à grand-chose et tout se termine rapidement.
Très moyen!