Résumé: Au coeur de l'immense forêt de Gouès, Basile grandit en suivant l'apprentissage des sorcières. Né fille, il rêve de pouvoir vivre pleinement en tant que garçon, sans devoir pour autant renoncer à la magie, que seules les femmes peuvent pratiquer dans cette partie reculée du monde. Basile décide alors de tout quitter pour se rendre sur l'île d'Eclepsis, métropole prospère où vit une autre caste de magicien·ne·s, les Occultistes. En tentant d'intégrer leur prestigieuse Académie de magie, il fait la connaissance d'Albain et Madeleine avec qui il partagera ses rêves, ses doutes et ses secrets...
D
epuis toute petite, Naig est attirée par l'occultisme. Dans la forêt de Gouès où elle vit, cette pratique est taboue, aussi s'y exerce-t-elle à l'abri des regards, surtout celui de maîtresse Barba. C'est chez elle qu'elle effectue son apprentissage de la magie avec son amie Rozenn. Mais Naig se sent engoncée dans les enseignements des sorcières et rêve par-dessus tout de rejoindre l'île d'Eclepsis et son université. Là-bas, elle pourra être elle-même et apprendre tout ce qu'elle souhaite. Pour atteindre son but, elle doit laisser tout ce qu'il connait derrière elle et partir vers l'inconnu.
« Une saga fantasy queer entre magie et action épique et quête d'identité ». C'est ainsi que Dargaud présente succinctement cette ambitieuse série. Toutefois, et avant que les moins curieux ne crient au wokisme et détournent le regard, il convient de préciser que le premier acte de cette trilogie ne se résume pas à cette accroche. Non, le titre possède de solides arguments pour convaincre un large public.
D'abord, un copieux volume de plus de 200 planches qu'Aloïs utilise pour poser un univers dense et brosser le portait de personnages attachants. Cette générosité se retrouve également dans le soin apporté aux décors, variés et fouillés, pour lesquels l'auteur fait preuve d'un réel souci du détail. Enfin, et c'est peut-être là que le conteur démontre tout son talent, la volonté d'offrir une trame solide qui, même si elle n'est pas pleinement surprenante, n'en demeure pas moins captivante. En proposant un monde où la magie est réservée aux femmes, il a la bonne idée d'inverser les rapports habituels. Ici, ce sont les hommes qui doivent se cacher pour exercer cet art et les rares qui le font au grand jour sont pointés du doigt.
C'est d'ailleurs cette caractéristique qui fournit la motivation nécessaire à Naig pour partir tout d'abord, puis qui lui donne un lieu à atteindre pour réaliser son rêve. Ce changement de contexte est propice à développer le cadre imaginé par l'artiste mais se révèle également un terreau fertile pour différents développements. En effet, en parvenant à intégrer l'école de magie, où de nouvelles amitiés naissent autant que de nombreux mystères se font jour, le héros va se confronter au regard des autres et questionner ses croyances, les règles établies et ses motivations pour trouver sa voie. Entouré d'une galerie de personnages variés qui apportent toutes et tous, dans l'humour très présent ou dans les intrigues, Naig devra évoluer et grandir pour trouver sa place dans sa nouvelle vie.
Aloïs réussit son entrée dans le neuvième art avec un premier tome généreux dans un univers dense et original. Si tout n'est pas maitrisé ni forcément très original, l'ensemble est très bien mené et mérite de s'y attarder.