Z
atonie, Pologne, seconde moitié du XXe siècle. La guerre est finie et le rideau de fer est tombé. Une vie à peu près normale a pu reprendre son cours sous le joug d’un parti communiste tout puissant. La situation n’est pas facile, mais la paix règne enfin. La mort de Staline, en 1953, pourrait même apporter un peu de répit à la population, qui sait. En attendant la concrétisation des promesses du paradis des travailleurs, Zofia et Stanisław Wachowisz prennent leur mal en patience et tentent de faire contre mauvaise fortune bon cœur. Un enfant, un deuxième en route, une maison en construction, ce ne sont pas les projets qui manquent. Et puis, Zofia entretient un rêve secret : visiter Paris ! Sa sœur y est déjà et lui envoie régulièrement des lettres qui lui font s’échapper de son quotidien gris et si monotone. Un jour, elle aura un passeport et pourra aller en France, c’est certain, sinon à quoi bon continuer ?
Łukasz Wojciechowski passe en mode chronique biographique à cent pour cent en retraçant le plus fidèlement possible la vie de sa grand-mère. À l’occasion, il rend également hommage aux Polonais qui, après un conflit destructeur, endurèrent pendant près de cinquante ans les «joies» du socialisme le plus aliénant. Le projet est évidemment grave, rempli de respect et d’émotion. En effet, il est impossible ne pas être touché par les épreuves qui ont entaché la trajectoire de ce couple lambda. Seulement, dans ses albums précédents, l’auteur avait su élargir sa focale et généraliser son propos. Le rôle de l’urbanisme et de l’architecture sur le devenir des populations, l’importance de l’art, etc., ces éléments venaient appuyer et renforcer les personnages. Ce n’est malheureusement pas le cas dans Loin de Paris. Le scénario se limite à la description des différents évènements que croisent cette femme et cet homme. Seules les lettres parisiennes de la sœur de l’héroïne permettent quelques rares parenthèses ou respirations bienvenues.
Trait mécanique et style désincarné, l’approche informatique du dessinateur est désormais bien connue. Le côté synthétique des dessins se montrait parfait afin de dépeindre la réalité des grands ensembles, des villes et du béton en général. Pour ce qui est de la psychologie des protagonistes, de la nature ou du vent sur la plaine de la voïvodie de Lubusz, le résultat s’avère moins probant. Pourtant, Wojciechowski ne démérite pas et propose quelques inventions purement graphiques intéressantes.
Récit familial avant tout, Loin de Paris demeure un peu trop personnel pour totalement embarquer les lecteurs. Il reste un témoignage intéressant d’une époque révolue et déjà passablement oubliée, voire désuète (cf. l’anecdote de la visite de Youri Gagarine, par exemple). À réserver aux amateurs de l’Histoire de l’Europe de l’Est et de réalisme social.
Les avis
Jcn664
Le 14/10/2025 à 10:17:11
Loin de Paris est une œuvre extrêment intimiste Et contrairement à l'avis du chroniqueur ayant passé complètement à côté de son sujet. Le. Côté personnel et très intimiste, c'est tous à fait le principe même de l'œuvre.
Ça ne cherche pas à embarquer le lecteur mais à témoigner aux lecteurs d'une époque certe révolue mais pas totalement désuet, il faut aussi derrière avoir une grille de lecture différente cette situation est encore actuel dans pas mal de pays, contexte historique différents.
On retrace cette jeune femme aimé de son marié mais qui se sent prisonnière de sa vie, à cause de son propre pays et des communistes de l'est.
Et qui n'a que pour s'évader de sa vie maurose du communisme polonais, les lettres de sa sœurs vivant à Paris, lui envoyant des ouvrages, des disques.
Pouvoir aussi ressentir du point de vue des habitants du blocs de l'est cette relation étrange presque bizarre d'avoir une mère en état de choque devant un vinyle en mode oh que c'edt beau,
C'est la que le bouquin nous rappelle par quelques petites finesses l'écart presque multidimensionnelle entre le blocs de l'ouest, et le bloc de l'est, comme deux monde parallèle qui se côtoies.
Chose qu'aujourd'hui on a plus tellement, et qu'on oublie trop souvent ça.
Le livre est aussi profondément triste dans son approche mais arrive avec certaines fulgurances à rendre le tous léger avec une finesses d'as l'écriture par certains trait humoristiques allegeant bien l'œuvre, ça rend plus de légèreté et c'est plutôt bien dosé.
Apres, la direction artistique est celons moi fabuleuse et une prise de risque assez phénoménal, et très atypique et expérimental dans un certains sens, c'est peut être un bon roman graphique qu'on pourrait lire en complément de la couleur des choses, flatland par exemple, dans cette continuité de roman graphique expérimentale ou délirante.