Le 22/05/2025 à 09:31:51
Le pitch n’est guère parlant en ce que c’est véritablement le traitement narratif qui apporte sa force à ce récit intime et solaire. Je parlais de l’originalité des planches d’Immonen, connu pour ses encrages et qui ici bascule quasiment dans le crayonné et une technique réaliste que l’on pourra rapprocher du maître Ikegami sur Crying Freeman. J’avoue avoir été un peu surpris, habitué au style qu’il adoptera plus tard (Identité secrète est l’une de ses premières séries complètes) et moyennement convaincu par une colorisation qui rappel le carton du moment, Nice house on the lake. Pourtant la finesse du trait, la justesse technique fabuleuse et la mise en scène toujours lisibles (même en petit format) s’adaptent parfaitement à ce récit où l’essentiel des textes recouvre les pensées de Kent couchées en un journal tapuscript. Il s’agit donc bien du journal intime d’un Superman alternatif dans un monde réaliste où la mythologie classique du personnage n’intéresse guère les auteurs, mais bien une révision moderne de l’attitude qu’un tel personnage adopterait en cherchant une normalité impossible du fait de ses pouvoirs. Ce qui est notable dans cet album (outre des textes tout en finesse) c’est cette vision positive d’une vie que l’on va traverser en compagnie de Clark Kent, de l’adolescence au crépuscule de sa vie. Busiek le voit comme un simple humain désirant un travail intéressant, une famille aimante et une vie paisible, très loin des soubresauts d’un monde super-héroïque ici inexistant. C’est en somme l’approche adoptée plus tard par Night Shyamalan sur son chef d’œuvre Incassable, avec ce type simple qui réalise progressivement ses capacités et les conséquences pour son environnement. Dans Identité secrète si la vie de Kent est globalement heureuse, l’auteur ne se coupe pas totalement du monde avec un gouvernement en mode « Etat profond » inquiet qui cherche à attraper le phénomène en créant un jeu du chat et de la souris pas totalement serein pour l’homme d’acier. Cette identité secrète ne sera partagé qu’avec sa compagne, une Loïs alternative, indienne d’origine, alors qu’il se contente de quelques interventions de sauvetage qui mettent modérément en danger son anonymat, pendant que sa vie se déroule presque comme un conte de fée: son entrée dans le journalisme se déroule sans accrocs, la qualité de son travail débouche sur des contrats d’édition, sa femme est épanouis professionnellement et une famille arrive bientôt. A une époque où la plupart des récits super-héroïque sont très sombres ou d’une naïveté affligeante, les auteurs trouvent le bon ton pour une magnifique histoire de vie réaliste et touchante dans sa simplicité, tout en parvenant à insérer des éléments héroïques et conspirationnistes discrets mais efficaces. Je parlais de singularité et c’est l’impression qui ressort à la conclusion de lecture de cet album majeur. Il propose l’équation quasi parfaite d’un bon récit super-héroïque entre l’intimité humaine et le message positif pour le lecteur, qui ne passe pas ici par l’icône « américainement » enfantine du slip rouge mais bien par un homme qui mène sa vie avec envie, détermination, simplicité et conviction, un modèle de vie sans doute plus parlant que celui du colosse en lycra. Lire sur le blog: https://etagereimaginaire.wordpress.com/2025/05/09/superman-identite-secrete/Le 23/03/2025 à 18:21:04
Magnifique. Le dessin est splendide, l'histoire sort des sentiers battus et les deux se marient parfaitement pour un récit très intimiste et réfléchi. Je n'ai pas d'affection particulière pour le personnage de Superman, trop fort et parfait le plus souvent. Il reste fort et parfait ici aussi quelque part, mais sans chercher le côté spectaculaire du super héros. L'approche beaucoup plus "humaine" et intimiste en fait la force, car tout extraordinaire que soit l'identité secrète en question, les questionnements de Clark parlent quelque part à toutes et à tous. Et soulignons à nouveau la qualité du dessin, c'est souvent sublime.Le 15/08/2021 à 15:51:40
Pas de super-héros, ni de super-vilain. Pas d’aventure cosmique, ni de menace extraterrestre. Il ne s’agit ici que de la vie d’un homme – presque – ordinaire. Bref, ce n’est pas une histoire de Superman et c’est peut-être justement en cela qu’elle est aussi belle (Superman: Secret Identity 2004, #1-4). J’ai toujours préféré Batman à Superman dont la quasi invincibilité me parait être un frein à la mise en place de véritables enjeux dramatiques. Bien que le gros titre rouge en couverture puisse laisser penser le contraire, il n’est cependant pas question de Superman dans cet album mais d’un adolescent ordinaire, Clark Kent, homonyme du super-héros et originaire comme lui du Kansas (mais pas de Smallville, la ressemblance a ses limites). Objet de taquineries voire de moqueries de la part de ses camarades et de ses proches, il se découvre par hasard des super-pouvoirs qui vont changer sa vie. Comme il l’avait déjà fait avec Marvels dix ans auparavant, Kurt Busiek raconte dans cet album une histoire à hauteur d’homme et encrée dans notre quotidien. L’adolescent en viendra, comme un clin d’œil, à enfiler le costume du super-héros et à agir en tant que tel mais l’histoire se concentre sur son parcours d’homme en suivant quatre périodes importantes de sa vie (l’adolescence, le monde du travail, la paternité, la retraite). Si quelques séquences d’action parsèment inévitablement l’album, il est surtout question d’introspection et, bien accompagné du superbe dessin de Stuart Immonen, même de poésie. En refermant l’album, on a, comme rarement, le sentiment d’avoir lu un comics "de super-héros" intelligent. Par le même scénariste et interrogeant notre rapport aux super-héros en usant des mêmes ficelles, la lecture de Batman : Créature de la nuit est évidemment recommandée.Le 13/11/2016 à 17:59:29
Je l'avoue tout de suite: je ne suis guère fan des comics (j'ai d'ailleurs revendu l'ensemble des comics que je possédais, excepté un seul : ce fameux diptyque). Très loin de cet univers, j'ai pourtant succombé à la lecture et surtout à la relecture de cette aventure.(je ne compte plus combien de fois je l'ai relu) Tout d'abord, le scénario est béton, il fallait oser créer l'histoire d'un Clark Kent, qui se trouve avoir les mêmes super-pouvoirs d'un autre Clark Kent, idéalisé dans les comics. Et puis, surtout ce qui m'a vraiment séduit dans cette histoire, c'est de suivre sur plusieurs années l'histoire de ce héros, qui de la jeunesse fougueuse et parfois dangereuse à une vieillesse plus apaisée , vit des aventures hors du commun, en essayant de protéger sa famille. En imaginant un Superman, adolescent puis père de famille, puis grand-père,Kurt Busiek prend à rebours tout l'imaginaire que nous avions sur ce héros, tant de fois illustré et repris. Enfin, le dessin de Stuart Immonem n'est pas en reste. Il s'éloigne des comics que j'ai pu lire, et c'est sans doute pour cela que cela me plait. Si comme moi, vous n'aimez pas les comics, n'en lisez qu'un seul: celui-ci qui est un chef d’œuvre absolu.BDGest 2014 - Tous droits réservés