Info édition : Mention "Première édition". Avec "Une tradition vivante - L'art du papier découpé" de 6 pages, prologue de Maou de 8 planches et "Carnet d'esquisses" de 10 pages, le tout en début d'album.
Résumé: Années 90 au Pays d'Enhaut, Alpes vaudoises. Urs, 14 ans, croit reconnaître, parmi des élèves venus d'Angleterre, Miss Wu la belle chinoise (qui porte un cache-oeil) d'une ancienne BD d'aventures. Les tentatives de parler à la jeune sosie de Miss Wu, qui en réalité se prénomme Mei, semblent vouées à l'échec... Jusqu'au moment où Urs parvient à entraîner Mei sur le télésiège au moment de la fermeture. Les deux adolescents se retrouvent bloqués sur l'installation arrêtée pour la nuit. Persuadés de finir congelés avant l'aube, ils se rapprochent de plus en plus... Ils sont retrouvés par les secours quelques instants après leur premier baiser.
L'été suivant, lors d'une randonnée, Urs s'étonne de tomber sur Mei. Elle se montre très distante, pour une raison qu'elle ne peut pas dévoiler.
10 ans plus tard, Urs réalise des découpages qui se vendent à quelques touristes séjournant dans la région. Un jour, à sa grande surprise, un courrier d'une galerie londonienne lui propose une exposition de ses oeuvres.
A Londres, la baronne Frida von Fürstendorfkirchen, directrice de la Galerie F&M, lui présente sa compagne : Mei. Urs est étonné en retrouvant la jeune chinoise de ne ressentir ni déception ni frustration ni même désir. Face aux questions d'Urs, Mei retire son cache-oeil, révélant ses deux yeux intacts, en précisant qu'il y a à Taïwan une personne qu'Urs connaît bien, qui pourra dévoiler enfin le mystérieux secret...
P
ays d’En-haut, années nonante. Urs est un jeune du cru : ski en hiver, drague, malentendu et peu de perspectives une fois la saison touristique passée. L’époque n’est plus à l’autarcie et à l’économie de subsistance, mais quand l’école ce n’est pas trop ça et que le futur est flou, ce n’est pas toujours facile de se projeter dans l’avenir. Là, il a fait la connaissance de Mei et Sybil, enfin surtout de Mei. En plus d’être charmante, la jeune femme est le portrait craché d’une de ses héroïnes préférées, Miss Wu (une vieille BD américaine). Il espère qu’elle reviendra cet été… En attendant, il s’est mis à réaliser des découpages traditionnels. C’est son père qui lui apprit cette ancienne technique régionale. Avec de la chance, cela lui permettra de gagner un peu d’argent.
Auteur vétéran auréolé de tous les honneurs, Cosey revient avec Yiyun, un album synthétisant toutes ses préoccupations ou presque : un héros romantique un peu paumé, un ancrage géographique fort (personne ne dessine aussi bien les montagnes enneigés que l’auteur d’À la recherche de Peter Pan), la Chine et les conséquences de ses politiques (qui ne se limitent pas au génocide culturel tibétain). Le tout baigne dans une ambiance imprégnée de philosophie orientale, embaumée des volutes de fondue moitié-moitié, évidemment (le yin et le yang sont partout). Résultat, un petit air de déjà-vu, plusieurs même, accompagne le lecteur au fil des pages.
Cependant et heureusement, il s’agit réellement davantage d'approfondissements et de nouvelles explorations de thèmes connus que de recyclage ou de rabâchage de fin de carrière. En effet, les enjeux sont bien d’aujourd’hui, tandis que les espoirs et les rêves d’Urs s’avèrent universels. Outre les innombrables clins d’œil et références aux classiques du Neuvième Art, le scénariste s’offre même une parenthèse «méta-BD» qui, en plus de briser le quatrième mur, met de l’avant les défis de la création et des exigences du public. Cette pique un peu exaspérée ajoute un autre niveau de lecture espiègle et nettement plus sérieux qu’il n'y paraît.
Ouvrage ambitieux à la construction un peu alambiquée, comme le suggère le long avant-propos et l’excellent prologue BD de Maou (Fleur de prunier), Yiyun arrive à dépasser une intrigue purement programmatique et propose plusieurs pistes de réflexion pertinentes. Visuellement, Cosey démontre que ses talents de conteur et de dessinateur ne sont en rien émoussés. Creuser toujours plus, tout en restant dans une continuité et une droiture morale de chaque instant, le tout depuis plus de cinquante ans. Chapeau et merci l’artiste.
La preview
Les avis
Yovo
Le 18/10/2025 à 16:44:56
C’est beau, nostalgique, saupoudré d’exotisme et de romantisme. Du Cosey, quoi.
À noter l’étrange configuration de l’album : l’histoire est précédée d’une longue préface documentée sur la tradition suisse du papier découpé, d’un étrange prologue dessiné par Maou, et d’un copieux carnet d’esquisses. L’ensemble crée un livre étrange mais très intéressant. Dommage toutefois que la superbe couverture n’ait que très peu de rapport avec l’histoire. Autre particularité, il n’y a ni vernis ni pelliculage, ce qui rend l’album vraiment fragile.